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31 octobre 2010 7 31 /10 /octobre /2010 15:23

La période d'occupation

 

            A Lille, pendant la drôle de guerre, les cinémas ont continué à fonctionner normalement. Seul le Capitole n’a pas repris après la fermeture de l’été et est resté fermé jusque décembre 1939.  La période de guerre a été la plus faste du cinéma. Malgré les contraintes du couvre-feu, les restrictions et la peur de la réquisition, les salles obscures deviennent les seuls lieux de distraction pour une population plus que déprimée. Dans les cinémas de Lille, le dimanche après-midi, c’était la cohue. Malgré la réglementation et les consignes de sécurité, les caissières continuaient à vendre des billets quand il n’y avait plus de place. Les spectateurs s’entassaient debout dans les allées et se disputaient les fauteuils dès que ceux-ci se libéraient. D’une année à l’autre, les recettes doublaient. L’acquisition d’une salle de cinéma était l’un des meilleurs investissements.

 

            Au fil des ans malgré tout, des difficultés s’accumulaient : augmentation des coûts, manque de personnels, pièces de rechange introuvables, augmentation des impôts, difficultés de transport, etc. Les économies de pellicules impliquaient pour les exploitants des difficultés à se procurer des films. Un quota maximum de deux copies par film était accordé à notre région. Les œuvres américaines ne franchissaient plus l’Atlantique. Dès juillet 1940, les Allemands avaient saisi les copies dans les entreprises de location pour éliminer les œuvres américaines ou celles qu’ils estimaient subversives. Les autres réintégrèrent les étagères des distributeurs.

 

            Pendant l'occupation, trois établissements ont été réquisitionnés par les allemands : « Cinéma des familles », « Rexy » et « Cinéac ». En février 1943, le Capitole, 21, rue de Béthune est aussi momentanément occupé par l’autorité allemande.

 

            Les Allemands avaient pour but de s’approprier notre économie, et les cinémas en faisaient partie. A Lille, le Cinéma des Familles, le Rexy et le Cinéac ont été repris par la SOGEC, une société allemande. Le second a été racheté au propriétaire qui trouva cela plus rentable que de toucher l’indemnité de réquisition. Le troisième appartenait à un juif, il fut donc purement et simplement volé.

 

            Les Allemands produisaient beaucoup de documentaires. C’est ce qui explique la suppression des doubles programmes et des courts métrages de fiction. En format réduit, ils imposèrent le 16 mm, tuant ainsi le Pathé-Baby et son 17,5.

 

            Des pressions étaient faites sur les exploitants pour qu’ils programment les productions allemandes. Pour mieux les manipuler, les autorités les invitaient régulièrement au restaurant Elie à Lille. On leur distribuait des bons d’essence et des laissez-passer. A cette occasion, le docteur Schaedenitz s’entretenait avec ceux qui ne passaient pas suffisamment de films germaniques.

 

            Des incidents étaient signalés au cinéma Familia rue de Béthune, à Lille lors des représentations du vendredi 19 mars et dimanche soir 21 mars 1943. Lors de l’apparition de Laval sur l’écran, des spectateurs ont toussoté, murmuré et sifflé. La salle fut  éclairée immédiatement et certains se sont mis à rire puis à applaudir. Dans ce genre de situation, l’exploitant était immédiatement interpellé. Le directeur du Familia expliqua ces incidents par le fait que l’assistance était très mêlée ce soir-là et comportait une majorité d’ouvriers. La salle était comble et les auteurs de ces « troubles » n’ont pu être connus. Le même dimanche, en soirée au Ciné Actualités, rue des Ponts de Comines, toujours au moment de l’apparition de Laval sur l’écran, un spectateur a crié des balcons : « Minteux ». Il n’a pu être identifié. Décidément, ce dimanche 21 mars devait être un jour de pleine lune, car le même soir au Cinéac, rue Faidherbe, un spectateur a crié «à bas Laval». Il a été mis à la porte immédiatement par la direction de la salle qui a omis de relever son identité. Les exploitants avaient de bonnes raisons de craindre les incidents dans leurs salles, mais ils n’étaient pas pour autant des délateurs. Le 24 mars 1943, dans la soirée, lors de la projection des actualités au Cinéchic, un coup de sifflet, ainsi que maints toussotements saluèrent la péroraison de Pierre Laval. L’auteur du coup de sifflet se trouvait au balcon mais il n’a pas pu être identifié. Le 25 décembre 1943, au Rexy, rue de Béthune, pendant la séance de 15 heures, lors de la projection d’un film où Déat était représenté, prononçant un discours, les spectateurs ont « osé » se mettre à rire à haute voix. Cela a valu un rapport du commissaire de police.

 

            Toujours au Familia de Lille, le 6 février 1944, vers 20 heures 40, une bonne partie des douze cents spectateurs qui assistaient à une représentation cinématographique, siffla à plusieurs reprises et assez fortement lors de la projection des actualités de la semaine se rapportant au discours que M. Henriot, ministre, secrétaire d’état à la propagande prononça le 29 janvier 1944 à Lille. Bien que la lumière fut rétablie pendant quelques secondes, la projection ne fut pas interrompue. Les mêmes incidents plus atténués se sont produits pour la même projection dans les cinémas à l’Eden vers 17 heures, aux Actualités vers 20 heures 35 et à l’Omnia vers 13 heures 30.

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commentaires

G
<br /> bravo pour ce texte et meilleurs voeux. Je trouve cet article très intéressant. Avez-vous trouvé des photos ou cartes postales de ces cinémas ? Cordialement<br /> <br /> <br />
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